Tuesday, October 25, 2005

Grippeaviaire.exe: le bug de l’an 2005?

Un mal qui répand la terreur,
mal que le ciel en sa fureur
inventa pour punir les crimes de la terre :
La grippe, puisqu’il faut l’appeler par son nom
Fait aux oiseaux la guerre
Les volatiles n’en meurent pas tous
Mais tous sont soupçonnés...
Ce virus qui tue les oiseaux, fait bien vivre les médias. Face à la paranoia qui s’empare des humains (même chez les médecins), peut-être est-il bon de faire une petite synthèse.

Tout d’abord ne confondons pas grippe et grippe:
La grippe aviaire n’a rien à voir avec la grippe saisonnière. Celle-ci revient tous les ans, s’attaque à 10 à 15% de la population, est sévère pour certains groupes à risque (patients âgés, enfants en bas âges et malades chroniques). Un vaccin est disponible et recommandé pour les personnes à risque. On peut regretter que pour promouvoir la vaccination anti-grippale, au lieu de la gratuité du vaccin pour les groupes à risque, nos dirigeants aient choisi d’étendre le remboursement à toute la population. Cela entraîne en effet une demande accrue de la part de toute la population, surtout dans le contexte médiatique actuel. Et la conséquence en est le risque de manquer de vaccins pour les gens qui en ont vraiment besoin. Les antiviraux sont éventuellement utilisables pour soigner la grippe chez les personnes à risque.

La grippe aviaire (grippe du poulet, peste des oiseaux), quant à elle, est essentiellement une maladie animale qui nécessite jusqu’à présent des mesures d’ordre vétérinaire. La grippe aviaire provoquée par une souche A du virus grippal (H5, H7, H9..) a été identifiée il y a plus de 100 ans en Italie. Le virus H5N1, très virulent et qui provoque la mort des oiseaux malades, fait partie de la centaine de souches possibles de la grippe aviaire. Certaines de ces souches sont plus mortelles que d'autres. Il se peut aussi que le virus H5N1 soit de virulence différente selon la souche. Les dindons anglais avaient été contaminés en 1992 par une souche H5N1 qui n'avait rien à voir avec celle de la grippe asiatique. Mais les premiers cas connus de passage direct d'une souche H5N1 à l'homme sont survenus à Hong Kong (18 cas d'infection respiratoire, 6 morts) en 1997, avec récidive au Vietnam en janvier 2004. A l’heure actuelle, aucun cas de transmission d’homme à homme n’a été constaté. Sur plus de deux ans, 117 personnes ont été contaminées par ce virus dans des circonstances exceptionnelles (contact étroit avec volaille malade, consommation de viande de volaille malade crue ou mal cuite; il est important de préciser que l'on ne risque rien avec une viande normalement cuite), ce qui à l’échelon planétaire ne justifie pas la panique qui sévit à l’heure actuelle. L’OMS présume que le virus H5N1 incriminé circule depuis déjà avril 2003 parmi les populations de volatiles, de manière inaperçue. Qu’un nombre assez réduit de personnes ait depuis lors contracté la maladie, montre que le virus ne se transmet pas facilement de l’animal à l’homme. L'évolution de la grippe aviaire chez l’homme est cependant plus souvent fatale que dans le cas de la grippe humaine commune.
En réalité une soixantaine de personnes sont de grippe aviaire depuis le début de l'épidémie il y a deux ans sur les 117 ayant été infectées par la souche.
Un vaccin est actuellement à l'étude.

La "grippe pandémique" (trois au cours du siècle passé) survient lorsqu’un nouveau virus particulièrement virulent apparaît. L’absence de protection immunitaire de la population face à la survenue d’un nouveau virus entraîne la propagation à l’échelon mondial. Il est clair que dans ce type de situation, aucun vaccin ne serait disponible à l’avance de même que la quantité d’antiviraux serait insuffisante. Une telle situation de pandémie n’existe pas à l’heure actuelle.

Scénario catastrophe : Même si aucun cas de contamination inter-humaine n'a été rapportée jusqu’à présent, une prochaine pandémie de grippe aviaire (influenza A, H5N1) chez l'homme n'est pas exclue du fait de la diversification croissante des espèces infectées et de la multiplication des cas décrits d'infection humaine par ce virus. Le virus de la grippe aviaire aurait subi des mutations en 2005, susceptibles de rendre l’homme plus vulnérable. Les mutations pourraient conférer au H5N1 des propriétés lui permettant la transmission inter humaine. Cela provoquerait des épidémies à travers le monde et une éventuelle pandémie. Les scientifiques ne peuvent cependant vraiment se prononcer sur l’évolution du virus H5N1, ni en positif ni en négatif.

La présence simultanée des virus «humain» et «aviaire» risque d’engendrer une double contamination aussi bien chez l’homme que chez l’animal. Les porcs présentent une plus grande sensibilité à ce risque de double contamination, surtout s’ils vivent en contact avec les volailles et avec l’homme.
L’échange de matériel viral génétique entre deux types de virus pourrait donner naissance à un tout nouveau virus de la grippe qui, s’il présente des propriétés hautement pathogènes pour l’homme en plus d’un pouvoir de contamination d’individu à individu, représentera un danger pour la santé publique. Enfin, il n’est pas exclu de penser que l’homme, exposé de manière durable à une importante concentration de virus aviaire, puisse lui aussi donner lieu à une nouvelle variante, dangereuse, de la grippe humaine.

Elide Montesi

- https://portal.health.fgov.be/portal
- The WHO Writing Committee. Current concepts: avian influenza A (H5N1) infection in humans. N Engl J Med 2005; 353:1374
- Moscona A. Drug therapy: neuraminidase inhibitors. N Engl J Med 2005;353:1363

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